En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez le dépôt de cookies dans votre navigateur. (En savoir plus)

Doctorant F/H Les paysages sous-marins et le cinéma (H/F)

Cette offre est disponible dans les langues suivantes :
- Français-- Anglais

Date Limite Candidature : vendredi 16 juin 2023

Assurez-vous que votre profil candidat soit correctement renseigné avant de postuler. Les informations de votre profil complètent celles associées à chaque candidature. Afin d’augmenter votre visibilité sur notre Portail Emploi et ainsi permettre aux recruteurs de consulter votre profil candidat, vous avez la possibilité de déposer votre CV dans notre CVThèque en un clic !

Informations générales

Intitulé de l'offre : Doctorant F/H Les paysages sous-marins et le cinéma (H/F)
Référence : UMR6590-LAULED-001
Nombre de Postes : 1
Lieu de travail : RENNES
Date de publication : vendredi 26 mai 2023
Type de contrat : CDD Doctorant/Contrat doctoral
Durée du contrat : 36 mois
Date de début de la thèse : 2 octobre 2023
Quotité de travail : Temps complet
Rémunération : 2 135,00 € brut mensuel
Section(s) CN : Espaces, territoires, sociétés

Description du sujet de thèse

L'usage du territoire et l'exploitation des ressources marines et sous-marines n'ont cessé de s'intensifier au cours du 20ème siècle. Dans un contexte où ces espaces sont de plus en plus disputés, l'urgence d'une gestion durable des fonds sous-marins est une évidence, mais les notions de patrimoines naturel et culturel, ou de paysage sous-marin, peinent à s'ancrer dans les pratiques comme dans les imaginaires.
Cette thèse, qui présente un caractère résolument interdisciplinaire (entre géographie et études cinématographiques), se consacrera aux représentations cinématographiques des grands fonds océaniques, dont l'une des particularités est que la masse d'eau, comme les fonds eux-mêmes, ont été incomplètement explorés, sont quasiment inatteignables pour le commun des mortels, et donc difficiles à « faire voir » (ou entendre). Ils demeurent pour nos sociétés des paysages flous, dont la construction est puissamment tributaire des imaginaires culturels comme des apports scientifiques et des médiations technologiques. C'est ce lien entre investigation scientifique et élaborations imaginaires que ce projet de thèse ambitionne d'étudier.
L'imbrication étroite entre l'histoire des progrès techniques, de l'exploration des fonds océaniques et des représentations culturelles reste en effet largement à étudier. Au-delà du champ de la littérature (J. Verne, H.P. Lovecraft, W. Hodgson...) ou de la bande-dessinée (Hergé), le cinéma de James Cameron fournit un exemple particulièrement notable d'interaction entre découvertes scientifiques et production d'images dans le champ (science-)fictionnel, mais il est loin d'être le seul. De nombreux films ont accompagné depuis les premiers temps du cinéma la découverte progressive des grands fonds océaniques, qu'ils soient issus d'une production scientifique au sens strict, de celui de l'expression documentaire, ou encore du champ de la fiction, que celle-ci soit ancrée dans notre réalité ou qu'elle s'en éloigne pour toucher au domaine des imaginaires de la fantasy.

La thèse vise à analyser la construction et la circulation des représentations des paysages sous-marins via le puissant média de diffusion qu'est le cinéma, tout en s'interrogeant sur leurs modalités de mise en œuvre technologique, leurs implications culturelles et leurs enjeux esthétiques. Dans cette optique, le corpus étudié est ouvert à des supports variés : documentaires et fictions, sources amateurs, scientifiques ou professionnels du cinéma.
Nous entendons ici par paysage sous-marin l'ensemble de la colonne d'eau ainsi que les fonds, y compris (et notamment) au-delà de la zone euphotique. Ces milieux impliquent des contraintes très spécifiques tant dans l'accès que dans la prise de vues (réduction ou absence de lumière, turbidité, pression, mouvements, étanchéité…), qui déterminent des conditions de visibilité et des formes du regard, à travers des innovations technologiques qui en renouvellent ou en déplacent constamment les représentations disponibles. À date récente, ces contraintes induisent notamment la recherche de palliatifs à la difficulté de prises de vues classiques par des apports d'images numériques (images radars, thermiques, champs magnétiques, électriques ; caméra virtuelles, motion et performance capture, imagerie 3D…), mais également par le rôle tout particulier des paysages sonores, qui ne doivent pas être négligés.
Plus spécifiquement, l'expérience des paysages des grands fonds sous-marins bouleverse nos repères, dans la mesure où elle est peu ou prou toujours médiatisée par les images. Si des artistes ou des chercheurs ont pu souligner la dimension tactile de l'appréhension du paysage sous-marin – en termes de contact, de pression, d'apesanteur relative, de mobilité en trois dimensions, d'embodiment, qu'en est-il des grands fonds marins qui demeurent un environnement fondamentalement inatteignable par l'expérience corporelle directe ? À telle enseigne, il faut donc se demander comment cette spécificité est-elle restituée ou ré-élaborée dans le champ et à travers la médiation des images et des sons ? Comment notre culture visuelle du paysage « émergé » conditionne-t-elle – en termes de composition, de rapport au cadre, de perception des points cardinaux et de l'horizon, de sensation proprioceptive, de constitution du point de vue... – notre regard sur les paysages « immergés », et quelles en sont les marges de renouvellement (plans de surfaces vue du dessous, plans de pleine eau…) ?

À partir de cette première formulation du sujet, des axes de recherche plus précis pourront être déterminés. À titre d'exemple, et non-exhaustivement :
- Envisager les représentations des grands fonds à partir d'une approche qui les historicise, et qui les situe géographiquement. Ces paysages, lorsqu'ils apparaissent au cinéma, sont en effet rarement situés de façon précise sur le globe, ou dans leur caractéristiques propres (faune, flore, géomorphologie...). Ils sont ainsi souvent présentés comme des paysages atopiques et donc, en un sens, possiblement utopiques. Dans cette optique, une analyse d'un large corpus (tout du moins en première partie de thèse) permettrait de dégager des éléments statistiques à grande échelle, mais aussi de réfléchir aux formes de distinction qui s'opèrent entre les lieux (ou les configurations) de tournage, et les lieux diégétiques dans le cadre de la fiction.
- Les paysages sous-marins et les grands fonds en particulier bousculent l'esthétique paysagère héritée de la fréquentation des paysages émergés et en renouvellent les codes de lecture et d'interprétation. Les expériences plastiques ou sensibles propres aux grands fonds construisent une esthétique qui évolue très rapidement au fil des productions d'images : lumière, couleur, visibilité, motifs, cadrages, mouvements…
- Les représentations de l'océan profond sont très spécifiques, de par la convergence de facteurs (absence de lumière et de repères, pression, bestiaire étrange…) qui alimentent un imaginaire « noir » (paysages oppressants, dangereux). Dans les faits comme dans les esprits, le dark ocean interroge notre rapport à la mort, au néant, la descente dans les abysses est associée à une chute sans fin, angoissante et tragique. La peur et le morbide sont associés à la nuit éternelle des profondeurs océaniques, mais également l'attirance et la fascination d'un au-delà qui peut aussi être très luminescent (Jérémie Brugidou, 2022).
- Analyser les représentations cinématographiques des grands fonds comme relevant d'emblée d'un double imaginaire, scientifique et spectaculaire. Qu'ils soient tournés par et pour des scientifiques, destinés à une meilleure connaissance du milieu dans un cadre documentaire, ou élaborés en vue de la fiction, les paysages des grands fonds développent en effet un imaginaire de l'innovation scientifique et, simultanément, du spectacle d'un monde nouveau, mal connu et intrigant. C'est également un monde qui n'est guère celui « du silence », pour reprendre le titre du film de Jacques-Yves Cousteau et Louis Malle, mais aussi un monde de sonorités diverses et originales. Un monde fait de matérialités spécifiques aussi, que la thèse pourra étudier à travers une approche plus frontalement esthétique.
- Ces représentations conditionnent nos manières de penser et d'agir sur ces espaces, d'un point de vue social, politique, juridique et scientifique. La représentation d'un océan immense, infini et insondable alimente un rapport au milieu marin pensé comme une ressource inépuisable, une ultraressource illimitée (Roberto Casati, 2022). Les puissants enjeux économiques (ressources minéralogiques, énergétique et halieutiques, maîtrise des réseaux de communications par câbles sous-marins…) attisent des stratégies de conquêtes. Le droit peine à réguler les conflits, comme la science peine à convaincre de la nécessité d'une exploitation raisonnée du milieu océanique, tant la pensée d'un far-deep ouvert aux plus aventuriers légitimise plus ou moins consciemment les appétits prédateurs. L'écologie, l'économie et le politique entretiennent alors des rapports ambigus où le chercheur est lui-même instrumentalisé dans cette quête de l'exploration moderne.

La méthodologie et les objectifs de la thèse seront bien entendu affinés au regard du profil du ou de la doctorante recrutée, qui peut avoir effectué son cursus en sciences sociales (géographie, paysage), mais aussi en arts (études cinématographiques, histoire de l'art) et des premiers échanges avec le comité de thèse. Néanmoins, plusieurs étapes sont d'ores et déjà envisagées :
- Le choix du corpus cinématographique : si une approche statistique large peut amener des éléments quantitatifs instructifs, l'analyse sera ensuite restreinte pour permettre une approche qualitative (par période, aire géographique, auteur, types d'espaces ou régimes d'énonciation audiovisuel).
- La recherche des cooccurrences et filiations dans le champ des représentations (visuelles ou non) au sein du corpus, au regard des études cinématographiques mais aussi d'autres sources culturelles et scientifiques ; et l'analyse de ce que ces circulations culturelles révèlent de la coconstruction des paysages sous-marins.
- L'interprétation de ces représentations en fonction d'un imaginaire des paysages sous-marins qui a lui-même été largement légué par le cinéma (qu'il soit scientifique, ou à vocation spectaculaire et grand public), particulièrement en ce qui concerne des acteurs en prise avec les grands fonds marins (scientifiques, juristes, artistes, activistes, exploitants, décideurs), lesquels n'ont qu'un accès indirect – et techniquement médiatisé – aux espaces sur lesquels porte leur travail.

Contexte de travail

La thèse sera portée par Laurence Le Dû-Blayo à l'UMR CNRS ESO, plus précisément au sein d'ESO-Rennes qui accueille en moyenne une trentaine de doctorants. Le ou la doctorante sera donc inscrit.e à l'Ecole doctorale STT (Sociétés, Temps, Territoires) et bénéficiera des moyens mis à disposition au sein de l'équipe. La co-direction en études cinématographiques portée par Eric Thouvenel Professeur à l'université Paris Nanterre lui ouvrira également un accueil au sein de l'UR4414 HAR (Histoire des arts et des représentations). Outre le comité de suivi, un comité de thèse sera constitué pour le suivi scientifique de la thèse. Son objectif est d'enrichir l'ouverture disciplinaire de la codirection (géographie + études cinématographiques) par les entrées complémentaires opportunes sur le sujet, notamment océanographie, physique du globe, anthropologie, philosophie, techniques de prises de vues...
Des qualités rédactionnelles en français avérées sont indispensables, une aisance en anglais souhaitée.

Contraintes et risques

Le ou la doctorante devra s'intégrer dans les laboratoires d'accueil, participer à la dynamique des équipes de recherche, s'impliquer dans des projets de communications et publications, s'engager dans les déplacements nécessaires aux recherches (entretiens, séminaires...).