Informations générales
Intitulé de l'offre : Doctorant (H/F) : Trajectoires d'adaptation des ressources en eau dans les territoires
Référence : UMR7619-AGNDUC-002
Nombre de Postes : 1
Lieu de travail : PARIS 05
Date de publication : mardi 28 octobre 2025
Type de contrat : CDD Doctorant
Durée du contrat : 36 mois
Date de début de la thèse : 5 janvier 2026
Quotité de travail : Complet
Rémunération : La rémunération est d'un minimum de 2200,00 € mensuel
Section(s) CN : 01 - Interactions, particules, noyaux du laboratoire au cosmos
Description du sujet de thèse
Dans le contexte des changements globaux, d’amplification des phénomènes extrêmes et d’accroissement de la population, la pression sur les ressources en eau douce augmente. Il est urgent de repenser le partage de l’eau (Pricope et al., 2025). Il faut, d’une part, bien connaître la ressource (superficielle et souterraine) et, d’autre part, bien connaître les usages. De nouveaux outils intégrant ces deux dimensions sont nécessaires pour que les décideurs et les acteurs des territoires puissent agir au bon moment pour répartir de façon juste, efficace, cette eau douce qui devient rare. Eux seuls ont les clés pour décider des priorités en termes de santé, de protection des écosystèmes et des enjeux économiques au sein de leur territoire.
La réflexion sur de tels outils doit engager scientifiques, citoyens, parties prenantes et décideurs politiques dans un processus de co-construction, pour maximiser la possibilité que les outils soient performants et adaptés aux besoins des territoires qui voudraient les mettre en œuvre. Cette thèse s’inscrit dans ce cadre en se focalisant sur l’évolution des ressources en eaux d’un point de vue quantitatif (débits des cours d’eau, volume et niveau des nappes, humidité des sols) en France métropolitaine, ce qui impose d’accorder une attention particulière à l’irrigation agricole qui représente 60 % de la consommation d’eau douce annuelle en France, et plus de 80 % en été (Arambourou et al., 2025).
Le premier objectif sera de développer un outil permettant de simuler l’évolution temporelle de ces variables et de leurs variations saisonnières sur le long terme (tendances) et de manière territorialisée, en tenant compte des contraintes imposées par le changement climatique, l’évolution de l’occupation des sols et des prélèvements d’eau associés. Ce travail s’appuiera sur une analyse des usages de la ressource (prélèvements et consommations par secteurs dans le temps et l’espace), qui permettra aussi d’identifier quelques bassins versants à fort enjeu pour une réflexion prospective plus poussée avec les acteurs et décideurs de ces territoires. Le second objectif de la thèse sera en effet d’élaborer des scénarios plausibles et contrastés de l’évolution conjointe des ressources en eau et des usages agricoles dans les territoires sélectionnés, en co-construction avec les acteurs, et tenant compte des interactions offre-demande sous influence du changement climatique grâce à l’outil de simulation développé.
D’un point de vue méthodologique, l’outil de simulation intégrée des ressources et des usages en eau s’appuiera sur le modèle ORCHIDEE, qui décrit les surfaces continentales dans le modèle de climat de l’IPSL. Ce modèle offre une simulation correcte des variations du bilan hydrologique en France depuis 1960 et à haute résolution, en intégrant l’évolution du manteau neigeux, et tenant compte du climat, des sols, et du couvert végétal (Huang et al., 2024). ORCHIDEE fait partie des 10 modèles hydrologiques utilisés pour établir les projections hydro-climatiques du projet national Explore2 (Sauquet et al., 2025). Ces projections sont alimentées par une large gamme de projections climatiques régionalisées correspondant à différents scénarios de forçage radiatif, et permettent de caractériser les impacts hydrologiques et leurs incertitudes de manière spatialisée sur le territoire métropolitain et pour différents niveaux de réchauffement (TRACC). Le modèle ORCHIDEE est enfin muni d’une description à bases biophysiques de l’irrigation (Arboleda-Obando et al., 2024) qui a permis la première étude de l’évolution couplée des ressources en eau et de l’irrigation au cours du 21ème siècle en réponse au changement climatique anthropique (Arboleda-Obando et al., 2025).
Pour répondre au premier objectif, il conviendra d’enrichir ce modèle en améliorant la simulation des ressources en eau souterraine, en ajoutant les apports saisonniers par les retenues artificielles et les transferts entre bassins versants, et en intégrant les prélèvements non agricoles. Les données nécessaires seront obtenues via les inventaires nationaux et européens, et les produits de télédétection spatiale (surfaces irriguées, plans d’eau, humidité de sols, eaux souterraines par gravimétrie, etc.). Nous vérifierons que cet outil permet de mieux capturer les tendances hydrologiques passées en France, en particulier dans les régions très anthropisées. Des simulations factorielles (en désactivant les pressions anthropiques une par une) seront alors mises en place pour identifier leurs principales causes de ces tendances, dans une démarche d’attribution (Vicente-Serrano et al., 2019; 2019 ; Sebastian et al., 2019).
Les territoires cibles de la scénarisation seront choisis pour leur vulnérabilité actuelle ou future aux pénuries d’eau (par exemple les Pyrénées-Orientales, les bassins de l’Adour, Drôme ou Marais Poitevin, ou plus au Nord, ceux de la Seine ou de la Moselle), et en fonction de l’intérêt des acteurs locaux, des collaborations en cours, et de la disponibilité éventuelle d’observatoires ou d’expérimentations in situ. Les scénarios co-construits dans ces territoires permettront d’étendre les simulations factorielles jusqu’en 2050 ou 2100, afin d'identifier les scénarios/régions où les ressources en eau sont susceptibles de s'épuiser, avec des impacts négatifs sur la durabilité des ressources en eau et des systèmes socio-économiques (points de basculement), par opposition aux scénarios/régions où des compromis durables semblent possibles.
A l'issue de l'étude, les données et scénarios produits pourront être intégrés dans des processus de gestion de la ressource dans le cadre de la mise en œuvre, notamment du PNACC (Plan national d'adaptation au changement climatique). Ce travail contribuera au WP3 du Topic Center « Analysis and Modelling » de l’ERIC eLTER « Support for the simulation of scenarios and storylines assessing the impacts of environmental and anthropogenic changes on ecosystem functioning and services », bénéficiant ainsi des compétences « state-of-the-art » des équipes européennes engagées (FZJ et UFZ en Allemagne, UCan en Espagne, INRAE et CNRS en France).
Références bibliographiques
Arambourou, H., Ferrière, S., Belaud, G., Bouarfa, S. (2025). Quelle quantité d’eau utilisons-nous ? p31-49 in Comment partager l’eau en France ? À l’ère de l’anthropocène, édité par Sami Bouarfa, Marielle Montignoul, Thomas Pelte, Eric Sauquet, Quae, ISBN 978-2-7592-4098-2
Arboleda-Obando PF, Ducharne A, Yin Z, and Ciais P (2024). Validation of a new global irrigation scheme in the land surface model ORCHIDEE v2.2. Geoscientific Model Development, 17, 2141–2164, https://doi.org/10.5194/gmd-17-2141-2024.
Arboleda Obando PF, Ducharne A, Cheruy F, Ghattas J (2025). Joint evolution of irrigation, the water cycle and water resources under a strong climate change scenario from 1950 to 2100 in the IPSL-CM6. Earth Syst. Dynam. Discuss. [preprint], https://doi.org/10.5194/esd-2024-41, in revision.
Huang P, Ducharne A, Rinchiuso L, Polcher J, Baratgin L, Bastrikov V, Sauquet E (2024). Multi-objective calibration and evaluation of the ORCHIDEE land surface model over France at high resolution. Hydrology and Earth System Sciences, 28, 4455–4476, https://doi.org/10.5194/hess-28-4455-2024
Sauquet, E., Evin, G., Siauve, S., and 31 other authors incl. Ducharne, A. and Huang, P. (2025). A large transient multi-scenario multi-model ensemble of future streamflow and groundwater projections in France. Hydrology and Earth System Sciences Discuss., EGUsphere [preprint], https://doi.org/10.5194/egusphere-2025-1788
Pricope, N.G., Vicente-Serrano, S.M., Toreti, A. et al (2025). Increasing aridification calls for urgent global adaptive solutions and policy action. Nat Water 3, 512–515. https://doi.org/10.1038/s44221-025-00432-9
Contexte de travail
La thèse est construite dans le cadre d’un partenariat entre le CNRS-INSU et le Ministère de la Transition Ecologique (MTE). Le doctorant ou la doctorante pourra être mobilisable par cette administration partenaire afin, par exemple, de partager son travail et sensibiliser à sa démarche et à ses résultats. Il est attendu qu’environ 15 % du temps de thèse soit effectué au sein de cette administration (MTE, site de La Défense, Nanterre ; conditions à aménager).
La thèse sera dirigée par Agnès Ducharne (directrice de recherche au CNRS) et préparée au sein de l’Ecole Doctorale GRNE (Géosciences, ressources naturelles et environnement, ed398.sorbonne-universite.fr) et du laboratoire de recherche METIS (www.metis.upmc.fr), situé à Sorbonne Université, 4 place Jussieu, 75005, qui fournira bureau, ordinateur et moyens de calcul. METIS fait partie de l’IPSL (Institut Pierre Simon Laplace, www.ipsl.fr) qui sera associé à la thèse via le développement du modèle communautaire ORCHIDEE. La participation à des conférences et les frais de publication sera prise en charge grâce aux projets de l’encadrante, notamment le PEPR TRACCS (Transformer la modélisation du climat pour les services climatiques) ou, le cas échéant, le support de l’administration partenaire.
Les candidats et candidates devront être titulaires d’un master 2 ou équivalent en géosciences ou environnement, avec des compétences solides en hydrologie, agronomie, ou climatologie. La thèse demande une expérience, ou au minimum une forte appétence pour la modélisation et les méthodes quantitatives; elle impliquera de travailler sous environnement Unix, et de développer du code fortran (modèle ORCHIDEE) et des scripts d’analyse (en python, R, ou matlab). La personne sélectionnée devra maitriser le français et l'anglais (oral et écrit), et avoir une affinité pour le passage de la recherche à l’action au sein de l’administration partenaire et s’inscrire dans une démarche de transmission de sa démarche et des résultats en direction des décideurs publics, élus, administrations opérationnelles ou politiques.