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Thèse (H/F) : Génomique de l'adaptation à l'envrionnement portuaire

Cette offre est disponible dans les langues suivantes :
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Date Limite Candidature : jeudi 26 septembre 2024 23:59:00 heure de Paris

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Informations générales

Intitulé de l'offre : Thèse (H/F) : Génomique de l'adaptation à l'envrionnement portuaire
Référence : UMR5554-NICBIE-005
Nombre de Postes : 1
Lieu de travail : MONTPELLIER
Date de publication : jeudi 5 septembre 2024
Type de contrat : CDD Doctorant/Contrat doctoral
Durée du contrat : 36 mois
Date de début de la thèse : 1 novembre 2024
Quotité de travail : Temps complet
Rémunération : La rémunération est d'un minimum de 2135,00 € mensuel
Section(s) CN : Biodiversité, évolution et adaptations biologiques : des macromolécules aux communautés

Description du sujet de thèse

Base génétique de la portuarisation biologique, l'évolution des espèces marines dans les écosystèmes portuaires sous l’influence des pressions de sélection anthropiques

Résumé du projet de thèse:
Ce projet de thèse porte sur l’étude de la "portuarisation biologique", c’est à dire l'évolution des espèces marines dans les écosystèmes portuaires sous l’influence des pressions de sélection anthropiques. Sur les côtes du monde entier des ports ont été construits, toujours plus grands et plus nombreux. Ces nouveaux habitats sont comme des mésocosmes géants, souvent isolés de la mer ouverte par des écluses, où les espèces évoluent dans un environnement abiotique nouveau, et au sein d'un assemblage inédit d'espèces exotiques et indigènes qui parfois s'hybrident et se métissent. Les ports représentent des laboratoires darwiniens dans lesquelles des expériences évolutives se répliquent. Ce projet cible trois invertébrés marins présentant un syndrome de portuarisation, dans quatre ports ateliers, en se plaçant dans le cadre de travail des relations génotype-phénotype-environnement. Le séquençage de génomes, le profilage d'expression et du microbiome, et l’environnement biotique inféré par metabarcoding d’ADNe donneront accès aux trois compartiments. L’objectif sera d’identifier l’importance de l’hybridation et des variations structurales dans la portuarisation biologique. Dans un second temps un modèle de paysages de fitness sera ajusté à des cartes génotype-phénotype dans des environnements contrastés (port/mer). Enfin, une étude théorique par simulations permettra de projeter dans le futur l’évolution du système urbain-sauvage. Cette thèse doit nous permettre de mieux comprendre comment l'environnement portuaire façonne les pressions de sélection et modifie la démographie et le mouvement des espèces au sein des paysages marins anthropisés.

Thématique:
Les humains ont considérablement modifié l'environnement depuis un siècle, produisant de nouvelles pressions sélectives qui ont modifié le cours de l'évolution. L'évolution induite par les modifications environnementales d'origine anthropique est à la fois (i) un domaine de recherche passionnant pour les biologistes de l'évolution qui voient l'évolution se dérouler sous leurs yeux à une vitesse sans précédent, et (ii) une menace potentiellement grave pour les populations sauvages mais mal comprise. L'évolution urbaine est récemment devenue un domaine de recherche fertile, utilisant les villes comme répliques pour les études d'adaptation. Bien que les espèces marines évoluent indubitablement en réponse à l'urbanisation marine, la recherche sur les sciences urbaines marines en est encore à ses débuts (Todd et al. 2019). Nous proposons que les ports sont comme des laboratoires de terrain darwiniens fournissant des répliques d'expériences grandeur nature. En tirant parti de ces nouveaux habitats, nous visons à mieux comprendre la réponse des espèces marines aux changements environnementaux de l’Anthropocène (Touchard et al. 2023). Ce projet de thèse ambitionne de jeter les bases de l'étude de la "portuarisation biologique", l'évolution des espèces marines dans les ports sous l'action des pressions de sélection induite par les activités humaines (par analogie à la domestication se déroulant dans les agro-écosystèmes, cf. Touchard et al. 2023).
L'étude de l'évolution dans les écosystèmes portuaires présente plusieurs avantages. Tout d'abord, la taille des ports dépasse de loin celle des infrastructures de laboratoire. Le confinement portuaire est souvent important, avec des bassins fermés par des écluses, ce qui limite les échanges avec l'extérieur. Si les variables environnementales (température, salinité, polluants) ne peuvent pas être contrôlées comme en laboratoire, elles sont tamponnées sur de grands volumes. Deuxièmement, les environnements portuaires sont largement similaires les uns aux autres, et chaque port constitue une réplique de l'expérience, à l'instar des villes qui imposent des pressions de sélection similaires (Santangelo et al. 2022). Troisièmement, les environnements portuaires sont vraiment nouveaux pour les organismes marins. Ils y rencontrent des substrats artificiels qui n'existaient pas dans la nature, des produits chimiques qui n'existaient pas, du moins à des concentrations aussi élevées, et surtout, ils rencontrent de nouveaux assemblages d'espèces, l'environnement biotique, dominé par des espèces non indigènes (Leclerc et al. 2020). Quatrièmement, les expériences se déroulent sur des périodes plus longues que les expériences en laboratoire. Enfin, bien que les échanges avec la mer ouverte extérieure soient limités, les échanges entre les ports et avec la nature sont favorisés par le trafic maritime via le biofouling et les eaux de ballast, créant un réseau de connectivité anthropique potentiellement découplé de la connectivité naturelle (Touchard et al. 2023).

Objectifs:
L'objectif de ce projet de thèse est de tester les hypothèses suivantes : H1 : l’hybridation et les variations structurales au niveau du génome sont des voies évolutives prédominantes dans l'adaptation à l’environnement portuaire. H2 : les populations répondent à des pressions contrastées aux niveaux génotypique et phénotypique, ce qui affecte les paysages de fitness entre habitat sauvage et habitat portuaire. H3 : la structure du paysage marin avec une mosaïque d'habitats urbanisés est propice à l'adaptation convergente et à la réutilisation de variations génétiques partagées. H4 : les populations portuaires souffrent d'un syndrome de portuarisation et peuvent représenter une menace cachée sous-évaluée pour les populations naturelles (par exemple : la dette darwinienne de la sélection induite par l'homme, les effets génétiques négatifs de l'urbanisation imposant un fardeau de migration).

Contexte:
Nous adopterons une approche comparative en étudiant trois espèces d'invertébrés marins sessiles, les trois étant abondantes dans les ports et invasifs à l'échelle mondiale. Nous avons choisi deux espèces pour lesquelles nous avons de bonnes preuves préliminaires d'un syndrome de portuarisation : les moules Mytilus (Simon 2019 ; Simon et al. 2020) et les ascidies Ciona intestinalis (Le Moan et al. 2022, Fraïsse et al. 2022), et une espèce supplémentaire, l'huître du Pacifique Crassostrea gigas, dont nous connaissons bien l'histoire des invasions et des métissages (Gagnaire et al 2018) et qui devrait permettre une bonne comparaison avec les moules. Ces espèces sont des systèmes d'étude de l'équipe et, par conséquent, pour lesquels nous avons une expertise. Les trois espèces ont des traits communs : ce sont des organismes sessiles qui vivent sur des substrats artificiels durs dans les ports et sur des substrats rocheux dans la nature. Ce sont des espèces bentho-pélagiques, présentant un stade larvaire pélagique de courte (tuniciers) ou longue (mollusques) durée, assurant la dispersion. Elles peuvent également être transportées par les activités humaines (sur la coque des navires ou dans le ballast). Dans les ports, elles forment des populations denses. Ce sont des espèces introduites dans les ports à l'échelle mondiale.
Nous étudierons quatre ports français à savoir : Dunkerque, Dieppe, Le Havre et Cherbourg. Ils sont situés en Manche dans le région biogéographique du nord-est de l'Atlantique tempéré, ce qui minimise les facteurs historiques confondants. Ils partagent des propriétés communes, car ils ont des zones closes et fortement anthropisées, fermées par des écluses, à proximité de zones plus ouvertes affectées par des marées de forte amplitude. Nous connaissons bien ces ports que nous avons échantillonnés plusieurs fois dans le passé et nous avons de bons contacts avec l'administration portuaire. Ils se prêtent bien au déploiement d'expériences in situ dans des endroits calmes, à l'écart des activités portuaires mais dans le même bassin, avec des pontons flottants sur lesquels nous pouvons installer en toute sécurité des systèmes de biosurveillance et des cages.

Méthode:
Dans chaque port seront étudiés un site à l'intérieur du port au fond d'un bassin fermé par des écluses et un site à l'entrée du port coté mer. La base génomique du syndrome de portuarisation sera étudié dans le cadre de la relation triangulaire génotype-phénotype-environnement qui est essentielle pour comprendre et prédire les trajectoires évolutives, ainsi que la démographie et la connectivité, y compris le spillover (c'est-à-dire les évadés de l'environnement portuaire vers la nature) et le spillover génétique (quand il s’agit de leurs gènes).
Les génomes seront séquencés par la technique haplotagging permettant de reconstituer les haplotypes parentaux d’individus diploïdes. Sur les même individus divers mesures phénotypiques seront réalisées, l’indice de condition, des mesures morphologiques et l’asymétrie fluctuante, un profiling d’expression génique, et l’analyse du microbiome (dont la diversité chute chez les individus en état de stress physiologique prolongé). Pour les mesures environnementales nous nous appuierons sur l’étude des communautés d’espèces procaryotes et eucaryotes par analyse de métabarcoding de l’ADN environnemental.
Les données seront analysées par des méthodes standards de scans génomiques de la différentiation génétique entre sites, scans des associations génotype-phénotype et scans des associations génotype-environnement, en s’appuyant sur les régions communes des différentes comparaisons port-sauvage. Des approches multivariées seront utilisées compte tenu du type de mesures phénotypiques et environnementales hautement multidimentionnelles. D’autre part, nous explorerons la possibilité d’ajuster des modèles de paysage de fitness à des mesures synthétiques du taux d’admixture entre génomes sauvages et portuaires et de l’hétérozygotie génomique (Simon et al. 2018, travail préliminaire non publié). Enfin l’étudiant sera formé à l’étude théorique par simulations et pourra nourrir des modèles à partir des observations expérimentales afin de mieux comprendre le processus de portuarisation biologique, de tester les possibles menaces des populations portuarisées sur les populations sauvages et de prédire l’évolution du système dans le futur.

Résultats attendus:
L'évolution induite par les activités humaines dans des environnements altérés a reçu peu d’attention de la part des biologistes marins comparé aux scientifiques terrestres qui ont développé le champ de recherche de l’évolution urbaine au cours des dernières années. Les travaux de cette thèse combleront cette lacune en apportant des informations et des données nouvelles sur l'adaptation des espèces marines à l'environnement portuaire. Au-delà des aspects descriptifs, cette thèse fournira un cadre conceptuel, théorique et expérimental qui expliquera et, espérons-le, prédira le processus de portuarisation biologique et ses conséquences sur la faune marine sauvage. Les résultats devraient attirer l'attention non seulement des biologistes de l’évolution, mais aussi des médias et du public qui seront sensibilisés à la question de l'évolution induite par l'homme en tant que possible sixième facteur de menace de la crise de la biodiversité dans l’Anthropocène. L’étudiant aura une formation complète d’un point de vu du travail de terrain et de l’expérimentation in situ, de la production et de l’analyse de données génomiques modernes, et d’approches de modélisation et d’inférence des processus évolutifs.

Références bibliographiques:
Fraisse C, Le Moan A, Roux C, Dubois G, Daguin-Thiebaut C, Gagnaire P-A, Viard F, Bierne N (2022) Introgression between highly divergent sea squirt genomes: an adaptive breakthrough? Peer Community Journal, 2. https://doi.org/10.24072/pcjournal.172
Gagnaire P‐A, Lamy J‐B, Cornette F, Heurtebise S, Dégremont L, Flahauw E, Boudry P, Bierne N, Lapegue S (2018) Analysis of genome‐wide differentiation between native and introduced populations of the cupped oysters Crassostrea gigas and Crassostrea angulata. Genome Biology and Evolution 10: 2518‐2534. https://doi.org/10.1093/gbe/evy194
Leclerc JC, Viard F, González Sepúlveda E, Díaz C, Neira Hinojosa J, Pérez Araneda K, Silva F, Brante A (2020) Habitat type drives the distribution of non‐indigenous species in fouling communities regardless of associated maritime traffic. Diversity and Distributions 26: 62‐75. https://doi.org/10.1111/ddi.12997
Le Moan A, Roby C, Fraisse C, Daguin‐Thiébaut C, Bierne N, Viard F (2022) An introgression breakthrough left by an anthropogenic contact between two ascidians. Molecular Ecology 30: 6718-6732. https://doi.org/10.1111/mec.16189
Santangelo (2022) Global urban environmental change drives adaptation in white clover. Science 375: 1275-81. https://www.science.org/doi/10.1126/science.abk0989
Simon A (2019) Génomique de l’hybridation anthropogénique chez les moules Mytilus spp. et valeur sélective des hybrides. PhD thesis. 304 p. Université de Montpellier. Advisor: N. Bierne https://www.theses.fr/241622379
Simon A, Arbiol C, Nielsen EE, Couteau J, Sussarellu R, Burgeot T, Bernard I, Coolen JWP, Lamy J‐B, Robert S, Skazina M, Strelkov P, Queiroga H, Cancio I, Welch JJ, Viard F, Bierne N (2020) Replicated anthropogenic hybridizations reveal parallel patterns of admixture in marine mussels. Evolutionary Applications 13: 575‐599. https://doi.org/10.1111/eva.12879
Simon A, Bierne N, Welch JJ (2018) Coadapted genomes and selection on hybrids: Fisher's geometric model explains a variety of empirical patterns. Evolution Letters 2: 472‐498. https://doi.org/10.1002/evl3.66
Todd PA, Heery EC, Loke LH, Thurstan RH, Kotze DJ, Swan C (2019) Towards an urban marine ecology: characterizing the drivers, patterns and processes of marine ecosystems in coastal cities. Oikos 128: 1215-1242. https://doi-org.inee.bib.cnrs.fr/10.1111/oik.05946
Touchard F, Simon A, Bierne N, Viard F (2022) Urban rendezvous along the seashore: Ports as Darwinian field labs for studying marine evolution in the Anthropocene. Evolutionary Applications 16: 560-579. https://doi-org.inee.bib.cnrs.fr/10.1111/eva.13443

Contexte de travail

L’étudiant bénéficiera d’un environnement scientifique propice dans l'équipe BEM de l'ISEM (https://isem-evolution.fr/equipe/equipe-biodiversite-et-evolution-marines/), d’un accès à des clusters de calcul informatique avec une assistance privilégiée par la plateforme informatique de l’ISEM, et d’un réseau de collaborations nationales et internationales. Les expériences et les missions du projet son financés par le projet ANR DockEvol (https://anr.fr/Projet-ANR-23-CE02-0020).

Thèse de recherche fondamentale avec publication d’articles scientifiques et également possibilité de vulgarisation scientifique vers le grand public par des conférences organisées par les associations partenaires du projet ou par des articles de vulgarisation.

Informations complémentaires

Projet DockEvol financé par l'ANR (https://anr.fr/Projet-ANR-23-CE02-0020)